dimanche 9 septembre 2012

Un songe de scaphandrier


Entre deux eaux
Des poissons
voletant
autour de la tête
nuque raide 
ressac
lointain 
la lanterne veille 
le front empoissé
au pieds le plomb
aux mains le cuivre
le laiton
Du casque poli
                     e
                  v
                è
               l
le tube s'é
dans l'océan

Traverse alors le banc d'illusions de visages 

d'antans sans futur 
                                                                                                                                          sans présent
Brillants âppats.

Les algues (insidieuses convictions) s'enlacent

Pas plombé pesant comme la goutte
la déambule s'étoffe d'arrêts s'étouffe de ciseaux de rages
arrachent tout d'un 
                           certitudes
                           idées reçues
Rêves étrangers 
                       bonheurs copiés/
                                             / collés

Marcher encore.
Derrière les falaises d'ignorance sables épais de rancoeurs bois de fureur feux follets d'espérance

une
        
        Vill    attend.

Ses rues douces comme le lait 
ses femmes parées de goémon 
ses toits en nacre ses fiacres de perle
De son ciel tourbillonnant 
déferlent
monceaux d'étoiles
naufragés mélancoliques

armagnac 
boussoles 
sextants
                                                                                                                                                                                         
                                                                                                                                                                                                                                                                             .                                                                                                                                     Là-bas. 
Et j'ignore son nom.

jeudi 16 août 2012

La ville et le labyrinthe III

Toute cité possède ses rues connues, ses avenues brillantes, ses boulevards glorieux.
La ville alanguie, elle, est escarrifiée, peau sombre marquée par un artiste dément.
Aucune béance ne parvient à prendre le pas sur sa masse, myriade de chaos.
Beaucoup s'y sont essayés: architectes, urbanistes, guides, poètes, mais aucun ne peut tailler sa sanie divine.
La ville se défend, crée croûtes oxydées, excroissances vitrifiées; s'approprie le vide, l'avale, l'orne.
Parfois émerge un vestige de plan, une esquisse d'ordre: la folie d'un démiurge accablé d'entropie.
D'ichor frelaté, d'ambroisie à prix barré, elle se survit, s'atrophie, se bouture, cautérise ses plaies, s'épure, se défie, turpide, scellée.
Ses routes sont autres, cartographie confite d'improbables hasards, car au-delà des routes vues et perclues d'obstacles, hommes, femmes, sains et déments, suivent des sentes dont eux-mêmes méconnaissent la portée.
Une trace s'amorce d'un lieu, d'un autre, s'adapte constamment, évitant chemins fermés, excavations, brigands.
Les rumeurs sont l'encre d'une carte indicible aux oasis aussi inconstants que les dangers. Ses  rebonds retors entrelacent les habitants aveugles, dénouant histoires d'amour subites, vols à la tire, rapts, inspirations.
Telle est la ville alanguie: ses routes excavées ne sont que des coquilles vides.
Ses véritables chemins sont filles d'errance et de saccades.

lundi 30 avril 2012

la ville et les symboles VII

Les rues en dédales quadrillés dissimulent bien plus qu'elles révèlent les stances de la ville alanguie. Ici, les maisons tournent leur dos de fer forgé et de de béton aux goudron, façades nues, offertes au passant. De verre brisé les dentitions monstrueuses de squales endormis fleurissent sur chaque rebord, entre les géraniums. La ville se souvient. D'un temps de peur et de bombes, dont les échos résonnent encore dans ses pensées fossilisées, les maisons. La ville se souvient du fracas et du couvre-feu, des allées obscures, du silence moite des ombres subites. Les racines de la peur sont profondes, mais à l'abri de ses murailles, à l'envers de ses silences, des jardins et des cours intérieures, des fontaines, des parterres de fleurs, peuplés par les rires des enfants. Ainsi est la ville alanguie, enfouis sous ses rideaux de fer rouillé et de verre pilé, veillent ses bougainvilliers et la cité, pliage constant, n'offre que ses rebords. A chacun d'ouvrir l'origami aux arrêtes de rasoir, d'éveiller les joies d'une ville aux secrets replis de félicité délicate.

jeudi 2 février 2012

La ville et les odeurs VI

Le feu gagne la ville par les recoins, les angles morts, les bords de trottoir, les yeux des enfants. Les regards se voilent de verre fumé. L'incendie gagne les plus hauts immeubles, transmuées en grenats, en rubis, en colonnes de feu.
Le bitume s'adoucit, s'imprègne de la lente et suave indécence que le soleil exige. La peau de la ville se dore, s'enduit d'odeurs sucrées, fruit succulent que s'arrachent les dieux. Pourtant le fruit d'or dissimule ses cavités et excroissances, ses chancres secrets. Les remugles d'un été qui laisse traîner sa robe dans les eaux glauques des bras agonisants d'un océan épuisé, les ruisselets qui courent nus et noirs au milieu des ruelles, les ordures chauffées à blanc par un soleil sans pitié.
Ainsi est la ville alanguie, mâtinée de douceâtre et de vif, d'esquilles parfumées, de récifs saumâtres.