Toute cité possède ses rues connues, ses avenues brillantes, ses boulevards glorieux.
La ville alanguie, elle, est escarrifiée, peau sombre marquée par un artiste dément.
Aucune béance ne parvient à prendre le pas sur sa masse, myriade de chaos.
Beaucoup s'y sont essayés: architectes, urbanistes, guides, poètes, mais aucun ne peut tailler sa sanie divine.
La ville se défend, crée croûtes oxydées, excroissances vitrifiées; s'approprie le vide, l'avale, l'orne.
Parfois émerge un vestige de plan, une esquisse d'ordre: la folie d'un démiurge accablé d'entropie.
D'ichor frelaté, d'ambroisie à prix barré, elle se survit, s'atrophie, se bouture, cautérise ses plaies, s'épure, se défie, turpide, scellée.
Ses routes sont autres, cartographie confite d'improbables hasards, car au-delà des routes vues et perclues d'obstacles, hommes, femmes, sains et déments, suivent des sentes dont eux-mêmes méconnaissent la portée.
Une trace s'amorce d'un lieu, d'un autre, s'adapte constamment, évitant chemins fermés, excavations, brigands.
Les rumeurs sont l'encre d'une carte indicible aux oasis aussi inconstants que les dangers. Ses rebonds retors entrelacent les habitants aveugles, dénouant histoires d'amour subites, vols à la tire, rapts, inspirations.
Telle est la ville alanguie: ses routes excavées ne sont que des coquilles vides.
Ses véritables chemins sont filles d'errance et de saccades.
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